Vision Hippocratique : le stress en tant que processus potentiellement pathogène
Hippocrate reprenant la théorie Pythagoricienne des humeurs est à la base du concept d’homéostasie de et de ses conséquences en terme de maladies… « Toute dyscrasie ou rupture de l’équilibre normal est la cause de maladies ».
En 1865, Claude Bernard décrit le concept d’homéostasie sans toutefois le nommer: « Tous les mécanismes vitaux quelques variés qu’ils soient, n’ont toujours qu’un seul but, celui de maintenir l’unité des conditions de la vie dans le milieu intérieur ».
Dès 1878 Cl Bernard montre que lorsque la stabilité du milieu intérieur est perturbée, il y a une vulnérabilité à la maladie.
William Osler (1849-1919) montre « qu’un travail pénible et de lourdes responsabilités conduisent aux tourments et à l’anxiété dont la persistance peuvent entrainer des problèmes médicaux ».
Walter Bradford Cannon dès 1915 crée le nom d’homéostasie (grec; stasis : état, homoios : égal) lui associe la notion de stress et à partir de 1935 lie ce processus à la sécrétion d’adrénaline par les médullosurrénales dans le cadre d’un hyperfonctionnement sympathique adaptatif.
« Tout comme un matériau ne peut résister qu’à des contraintes modérées, l’homéostasie ne peut être maintenue que si les écarts à la normale restent relativement faibles. Au-delà, les processus correctifs permettant de faire face sont nécessaires : c’est le stress. »
Vision Darwinienne : le stress en tant que modèle biologique sélectif d’adaptation et donc de sélection naturelle
C’est en 1963 que Hans Selye utilise pour la première fois en médecine le mot stress et le définit comme « des tensions faibles ou fortes éprouvées depuis toujours, et déclenchées par des événements futurs désagréables ou agréables, etc., forces potentiellement destructrices ». C’est Hans Selye qui donne en au mot stress (latin : stringere : serrer, presser, rendre raide) son sens moderne.
Le stress comporte à la fois l’agent contraignant et les réactions physiologiques non spécifiques adaptatives qu’il nomme syndrome général d’adaptation (SGA 1950) avec ses trois phases : d’alarme rapide et brève, de résistance plus lente et enfin d’épuisement en cas de débordement des moyens de l’individu, qui peut conduire au maximum à la mort.
Les capacités adaptatives au stress ont leurs limites et influent sur la santé de l’individu. Le stress aurait alors une fonction adaptative vitale, la vie consisterait à s’adapter en permanence aux évènements changeants et à trouver les meilleurs moyens de réactions adaptées : « fright, flight, fight » ou « effroi, fuite ou lutte » sont des « réactions comportementales innées ou animales » selon Henri Laborit.
Vision phénoménologique
Dans la vision biologique du stress, il importe peu que l’agent stressant soit d’origine physique ou psychique, interne ou externe, plaisant ou déplaisant puisque la réponse non spécifique est toujours la même, seules comptent l’intensité de la demande de réajustement et les limites d’adaptation.
A l’opposé dans l’approche psychologique phénoménologique, c’est la perception par l’individu de la demande perçue et les ressources individuelles qu’il peut exploiter qui priment. Il s’agit d’un « phénomène perceptif dynamique et individuel plus important que l’agent stresseur ». R Lazarus (1984)
Dans la pensée cognitiviste, on peut voir des définitions du stress excluant le pôle physiologique de celui-ci comme c’est le cas avec la position de Jacques Larue (1995) « un état psychologique issue de la perception d’un déséquilibre entre les attentes perçues et l’autoévaluation de ses propres capacités à rencontrer les exigences de la tâche. »
Le traitement analytique lucide des informations extérieures agressives, le type de personnalité (pattern behavorial de type A de M Friedman et RH Rosenmann 1959), l’expérience passée (mémoire déclarative), le statut émotionnel présent, les croyances irrationnelles, l’estime de soi, le lieu de contrôle, le sens de l’humour sont autant de ressources personnelles susceptibles de plasticité de la réponse au stress et de transformer une situation stressante initialement négative en positive ou de la neutraliser en simple situation gênante. Il existe ainsi par des actes de pensées différents qui sont autant de capacités modulatrices du stress.
La théorie de l’attente de Victor H Vroom (1964) stipule que l’effort consacré à régler une tâche est fonction de trois variables :
- L’attente : c’est le rapport entre l’intensité de l’effort à fournir pour une performance attendue (degré d’efficacité).
- L’instrumentalité : est la perception des chances d’obtenir la récompense escomptée si la tâche est effectuée (degré de réussite).
- La valence : correspond à l’importance accordée à la récompense obtenue en cas de réussite (degré d’intérêt).
Cette théorie permet de préciser les raisons motivationnelles qui poussent un individu à fournir un effort pour une performance adaptative, elle suppose à l’inverse que les stress inhibiteurs peuvent être multiples. La motivation est synonyme de stress fonctionnel ou positif et conduit à une performance améliorée. La démotivation est synonyme de stress dysfonctionnel ou négatif et conduit à une performance dégradée.
Vision énergétique et cognitive du stress et de la performance d’AF Sanders (1983)
Cette vision conjugue deux approches, l’une computationnelle qui a trait à la qualité de l’extraction et de l’analyse des informations, la deuxième qui pense que la performance s’explique en termes de quantité de ressources énergétiques allouées à une tâche. Ce modèle fait appel aux théories de la motivation, de l’interférence (la gestion du stress est source de perte de temps et d’énergie), de l’éveil (un éveil moyen détermine le meilleur degré d’attention et optimise la performance).
Deux « feed-back » ou rétrocontrôles (l’un physiologique et l’autre cognitif) permettent un réajustement de la réponse adaptative en fonction de la performance obtenue et la performance voulue selon l’état physiologique de l’individu au moment de l’évaluation. Le stress est alors défini comme une sensation subjective désagréable au niveau de l’évaluateur lorsqu’un déséquilibre énergétique ne peut être compensé par l’effort. C’est le problème complexe de la circularité des concepts de stress et performance adaptative.
Rhumatologue Jean-François MARC,
Bibliographie par ordre alphabétique des auteurs
• Bernard C. Introduction à l’étude de la médecine expérimentale. 1903. Paris : C. Delagrave. 2e éd
• Cannon WB. The wisdom of the body. New-York: W.W. Norton, cop. 1939. [2nd]
• Dantzer R Stress. Universalis 8, 2002
• Dantzer R. Les émotions, 1988. Que sais-je ? n° 2380, Paris, PUF.
• Dantzer R. L’illusion psychosomatique, 1989.Paris, Odile Jacob
• Friedmann M., Rosenmann R.U.Type A Behavior Pattern : its association with cornary heart disease, Annals of clinical research, 1971; 3, 300-312
• Friedmann M., Rosenmann R.U. Type A Behavior and your heart, Knopf, 1974 New-York
• Hippocrate. Corpus Hippocratum, -460, -377http://remacle.org/bloodwolf/erudits/Hippocrate/table.htm
• Laborit H. L’inhibition de l’action, Biologie comportementale et physiopathologie, Presses Universitaires de Montréal, 1986.Masson, 2e édition.
• Lazarus R. Stress, appraisal, and coping. New-York, Springer 1984
• Lazarus R, Folkmann S and al. Appraisal, Coping, Health Status, and psychological Symptoms. Journal of Personality and Social Psychology, 1986.50 (3): 571-579
• Larue J, in Le Scanff C, Bertsch J. Stress et performance. 1995. Paris: PUF
• Osler W. The Evolution of Modern Medicine. A Series of Lectures Delivered at Yale University on the Silliman Foundation in April, 1913
• Rahe QH. , Holmes TH. The Social Reajustment Rating Scale, Journal of Psychosomatic Research, 1967; 11, 213-218
• Sanders AF. Towards a model of stress and human performance. Acta Psychologica,1983 ;53(1) : 61-97
• Selye H. Le stress de la vie: le problème de l’adaptation; trad. de l’anglais par P Verdun.1975 Paris : Gallimard. Nouv. éd. mise à jour. Les essais 192
• Selye H. The stress of life 1956 New-York : Mc Graw-Hill
• Serapis. Définition du stress, Bon ou mauvais stress? Le stress physiologique, Le stress musculaire, le stress psychologique, capacité d’adaptation. 2003.In:http://www.sante.cc/stress/articles/definition.htm
• Stora JB. Le Stress. 2002 Paris: PUF. Que sais-je? N°2575
• Vroom VH. Work and motivation. 1964. New-York; London [etc.] : J. Wiley.
Vision Hippocratique : le stress en tant que processus potentiellement pathogène
Hippocrate reprenant la théorie Pythagoricienne des humeurs est à la base du concept d’homéostasie de et de ses conséquences en terme de maladies… « Toute dyscrasie ou rupture de l’équilibre normal est la cause de maladies ».
En 1865, Claude Bernard décrit le concept d’homéostasie sans toutefois le nommer: « Tous les mécanismes vitaux quelques variés qu’ils soient, n’ont toujours qu’un seul but, celui de maintenir l’unité des conditions de la vie dans le milieu intérieur ».
Dès 1878 Cl Bernard montre que lorsque la stabilité du milieu intérieur est perturbée, il y a une vulnérabilité à la maladie.
William Osler (1849-1919) montre « qu’un travail pénible et de lourdes responsabilités conduisent aux tourments et à l’anxiété dont la persistance peuvent entrainer des problèmes médicaux ».
Walter Bradford Cannon dès 1915 crée le nom d’homéostasie (grec; stasis : état, homoios : égal) lui associe la notion de stress et à partir de 1935 lie ce processus à la sécrétion d’adrénaline par les médullosurrénales dans le cadre d’un hyperfonctionnement sympathique adaptatif.
« Tout comme un matériau ne peut résister qu’à des contraintes modérées, l’homéostasie ne peut être maintenue que si les écarts à la normale restent relativement faibles. Au-delà, les processus correctifs permettant de faire face sont nécessaires : c’est le stress. »
Vision Darwinienne : le stress en tant que modèle biologique sélectif d’adaptation et donc de sélection naturelle
C’est en 1963 que Hans Selye utilise pour la première fois en médecine le mot stress et le définit comme « des tensions faibles ou fortes éprouvées depuis toujours, et déclenchées par des événements futurs désagréables ou agréables, etc., forces potentiellement destructrices ». C’est Hans Selye qui donne en au mot stress (latin : stringere : serrer, presser, rendre raide) son sens moderne.
Le stress comporte à la fois l’agent contraignant et les réactions physiologiques non spécifiques adaptatives qu’il nomme syndrome général d’adaptation (SGA 1950) avec ses trois phases : d’alarme rapide et brève, de résistance plus lente et enfin d’épuisement en cas de débordement des moyens de l’individu, qui peut conduire au maximum à la mort.
Les capacités adaptatives au stress ont leurs limites et influent sur la santé de l’individu. Le stress aurait alors une fonction adaptative vitale, la vie consisterait à s’adapter en permanence aux évènements changeants et à trouver les meilleurs moyens de réactions adaptées : « fright, flight, fight » ou « effroi, fuite ou lutte » sont des « réactions comportementales innées ou animales » selon Henri Laborit.
Vision phénoménologique
Dans la vision biologique du stress, il importe peu que l’agent stressant soit d’origine physique ou psychique, interne ou externe, plaisant ou déplaisant puisque la réponse non spécifique est toujours la même, seules comptent l’intensité de la demande de réajustement et les limites d’adaptation.
A l’opposé dans l’approche psychologique phénoménologique, c’est la perception par l’individu de la demande perçue et les ressources individuelles qu’il peut exploiter qui priment. Il s’agit d’un « phénomène perceptif dynamique et individuel plus important que l’agent stresseur ». R Lazarus (1984)
Dans la pensée cognitiviste, on peut voir des définitions du stress excluant le pôle physiologique de celui-ci comme c’est le cas avec la position de Jacques Larue (1995) « un état psychologique issue de la perception d’un déséquilibre entre les attentes perçues et l’autoévaluation de ses propres capacités à rencontrer les exigences de la tâche. »
Le traitement analytique lucide des informations extérieures agressives, le type de personnalité (pattern behavorial de type A de M Friedman et RH Rosenmann 1959), l’expérience passée (mémoire déclarative), le statut émotionnel présent, les croyances irrationnelles, l’estime de soi, le lieu de contrôle, le sens de l’humour sont autant de ressources personnelles susceptibles de plasticité de la réponse au stress et de transformer une situation stressante initialement négative en positive ou de la neutraliser en simple situation gênante. Il existe ainsi par des actes de pensées différents qui sont autant de capacités modulatrices du stress.
La théorie de l’attente de Victor H Vroom (1964) stipule que l’effort consacré à régler une tâche est fonction de trois variables :
- L’attente : c’est le rapport entre l’intensité de l’effort à fournir pour une performance attendue (degré d’efficacité).
- L’instrumentalité : est la perception des chances d’obtenir la récompense escomptée si la tâche est effectuée (degré de réussite).
- La valence : correspond à l’importance accordée à la récompense obtenue en cas de réussite (degré d’intérêt).
Cette théorie permet de préciser les raisons motivationnelles qui poussent un individu à fournir un effort pour une performance adaptative, elle suppose à l’inverse que les stress inhibiteurs peuvent être multiples. La motivation est synonyme de stress fonctionnel ou positif et conduit à une performance améliorée. La démotivation est synonyme de stress dysfonctionnel ou négatif et conduit à une performance dégradée.
Vision énergétique et cognitive du stress et de la performance d’AF Sanders (1983)
Cette vision conjugue deux approches, l’une computationnelle qui a trait à la qualité de l’extraction et de l’analyse des informations, la deuxième qui pense que la performance s’explique en termes de quantité de ressources énergétiques allouées à une tâche. Ce modèle fait appel aux théories de la motivation, de l’interférence (la gestion du stress est source de perte de temps et d’énergie), de l’éveil (un éveil moyen détermine le meilleur degré d’attention et optimise la performance).
Deux « feed-back » ou rétrocontrôles (l’un physiologique et l’autre cognitif) permettent un réajustement de la réponse adaptative en fonction de la performance obtenue et la performance voulue selon l’état physiologique de l’individu au moment de l’évaluation. Le stress est alors défini comme une sensation subjective désagréable au niveau de l’évaluateur lorsqu’un déséquilibre énergétique ne peut être compensé par l’effort. C’est le problème complexe de la circularité des concepts de stress et performance adaptative.
Rhumatologue Jean-François MARC,
Bibliographie par ordre alphabétique des auteurs
• Bernard C. Introduction à l’étude de la médecine expérimentale. 1903. Paris : C. Delagrave. 2e éd
• Cannon WB. The wisdom of the body. New-York: W.W. Norton, cop. 1939. [2nd]
• Dantzer R Stress. Universalis 8, 2002
• Dantzer R. Les émotions, 1988. Que sais-je ? n° 2380, Paris, PUF.
• Dantzer R. L’illusion psychosomatique, 1989.Paris, Odile Jacob
• Friedmann M., Rosenmann R.U.Type A Behavior Pattern : its association with cornary heart disease, Annals of clinical research, 1971; 3, 300-312
• Friedmann M., Rosenmann R.U. Type A Behavior and your heart, Knopf, 1974 New-York
• Hippocrate. Corpus Hippocratum, -460, -377http://remacle.org/bloodwolf/erudits/Hippocrate/table.htm
• Laborit H. L’inhibition de l’action, Biologie comportementale et physiopathologie, Presses Universitaires de Montréal, 1986.Masson, 2e édition.
• Lazarus R. Stress, appraisal, and coping. New-York, Springer 1984
• Lazarus R, Folkmann S and al. Appraisal, Coping, Health Status, and psychological Symptoms. Journal of Personality and Social Psychology, 1986.50 (3): 571-579
• Larue J, in Le Scanff C, Bertsch J. Stress et performance. 1995. Paris: PUF
• Osler W. The Evolution of Modern Medicine. A Series of Lectures Delivered at Yale University on the Silliman Foundation in April, 1913
• Rahe QH. , Holmes TH. The Social Reajustment Rating Scale, Journal of Psychosomatic Research, 1967; 11, 213-218
• Sanders AF. Towards a model of stress and human performance. Acta Psychologica,1983 ;53(1) : 61-97
• Selye H. Le stress de la vie: le problème de l’adaptation; trad. de l’anglais par P Verdun.1975 Paris : Gallimard. Nouv. éd. mise à jour. Les essais 192
• Selye H. The stress of life 1956 New-York : Mc Graw-Hill
• Serapis. Définition du stress, Bon ou mauvais stress? Le stress physiologique, Le stress musculaire, le stress psychologique, capacité d’adaptation. 2003.In:http://www.sante.cc/stress/articles/definition.htm
• Stora JB. Le Stress. 2002 Paris: PUF. Que sais-je? N°2575
• Vroom VH. Work and motivation. 1964. New-York; London [etc.] : J. Wiley.